Livret (.pdf)
*voir notes pour les références signalées d’un astérisque
Écoutez-moi, n’ayez pas peur,
je ne suis pas un bonimenteur
Approchez-vous, bonnes gens,
je vais vous conter une histoire
écrite en lettres de sang,
restée gravée dans ma mémoire
En ce temps-là, disait Émile*,
jamais on ne se serait laissé faire
Nous étions forts, solidaires,
comme les cinq doigts unis
d’une main qui fait poing
Pour cogner la gueule des vaches
Pour ne plus suinter la misère
Pour en finir avec les Watrin*
Qui font de nos vies un enfer
En ce temps-là, disait Nestor*,
jamais on ne se serait laissé faire
Nous étions forts, comme des frères,
comme les cinq doigts unis
d’une main qui fait poing
Au nom de l’idéal libertaire
Chasser l’occupant de nos terres
Botter le cul des commissaires
Un drapeau noir dans la plaine
En ce temps-là, disait Gustav*,
jamais on ne se serait laissé faire
Nous étions forts, solidaires,
comme les cinq doigts unis
d’une main qui fait poing
Au nom des conseils ouvriers
Pour cogner flics et militaires
Tous les Noske et les Ebert*
Le drapeau rouge flotte sur la Rhur
Mais ce temps-là est révolu
Le code-barre nous a vaincu
Démocrates et disciplinés
Nous nous en allons voter…
Ce texte est un hommage à quelques personnalités et mouvements qui ont marqué l’histoire sociale. Il fait référence au syndicalisme révolutionnaire français d’avant 1914 (quand la CGT n’était pas un partenaire social mais une organisation prônant l’abolition de l’État, du capitalisme et du salariat), au mouvement makhnoviste ukrainien et au mouvement des conseils ouvriers allemands écrasés en 1919.
— Émile Pouget, syndicaliste-révolutionnaire et propagandiste de la CGT d’avant 1914.
— Watrin, garde-chiourme d’une mine de Decazeville que les ouvriers en colère eurent le bon goût de défenestrer un jour de 1886.
— Nestor Makhno, anarchiste ukrainien qui donna son nom au mouvement insurrectionnel ukrainien qui s’opposa aussi bien aux bolcheviks qu’aux tsaristes.
— Gustav Landauer, anarchiste allemand qui participa au mouvement des conseils ouvriers en Allemagne en 1919 et fut assassiné la même année par l’armée allemande.
— Noske et Ebert, représentants de l’aile droite de la social-démocratie allemande, jouèrent un rôle primordial dans la répression du mouvement spartakiste en 1919.
Yes we can/be green and grow*/Yes we can
Ils ont converti leur conscience
comme on convertit le pognon
À la nouvelle religion du capitalisme vert
Défenseurs impénitents d’un système qui prend l’eau
Le développement durable est leur nouveau credo
Ne pas toucher aux rapports de production
“Changer le pansement plutôt que penser le changement”*
Yes we can/be green and grow/Yes we can
Ils ont appris leur leçon Ils la déversent sur nous
La culpabilisation
Prélude à la répression
Défenseurs impénitents d’un système qui prend l’eau
Le développement durable est leur nouveau credo
Ne pas toucher aux rapports de production
“Changer le pansement plutôt que penser le changement”
Puisque le capitalisme s’évertue chaque jour à détruire nos vies, certains politiciens essaient de nous vendre un capitalisme propre, respectueux de l’environnement et durable, faisant de chacun de nous des pollueurs qu’il faut éduquer, sermonner voire punir. L’éco-capitalisme veut repeindre en vert le système, sans s’attaquer à son fondement : l’exploitation de l’homme par l’homme.
Il nous faut lutter contre l’idéologie dominante et les valeurs qu’elle porte : la foi dans la science (considérée comme « neutre », détachée de son environnement social et politique), dans le développement, dans la concurrence facteur de progrès, dans la consommation créatrice de croissance, dans la croissance créatrice d’emploi, dans l’emploi créateur de dignité, etc. Il nous faut lutter contre ces valeurs dominantes qui se présentent à nous comme naturelles, a-temporelles. C’est aussi une guerre contre ceux qui les portent : ces oligarchies qui n’ont pour seul souci que le développement durable de leur domination économique, politique et culturelle. Cette guerre a un nom : la lutte des classes.
Be green and grow : expression signifiant que l’on peut allier croissance économique et écologie.
« Changer le pansement plutôt que penser le changement » (Serge Latouche)
Ils partirent un matin,
la fleur au fusil,
tels des fiers-à-bras
Mais la peur au ventre
sous les viva de la foule ne s’entend pas
Fuck your war, your fucking war
Tant de vers se repaissent
de la chair de ces gueux abandonnés là
En des postures obscènes,
sous un soleil en feu, chair en croix
Fuck your war, your fucking war
Combien de temps encore les prolos accepteront-ils de s’entretuer pour le plus grand profit de leurs élites politiques et économiques ? Combien de temps encore les citoyens se laisseront berner par les discours des va-t-en-guerre modernes sur le Droit, la Justice et la Démocratie ?
Des corps mutilés, des carcasses calcinées
Des soldats crient « Victoire ! » et partent s’enivrer
Flotte une odeur de sang comme flottent les drapeaux
La démocratie s’apprend la tête dans le caniveau
L’horreur est humaine
L’horreur c’est ce système !
Le dictateur déchu, son image piétinée
La foule en liesse s’écrie « Vive la liberté ! »
Dans le sillage des tanks, des missionnaires armés
De nouveaux convertis s’apprêtent à gouverner
L’horreur est humaine
L’horreur c’est ce système !
« Vive la liberté ! » – de se faire exploiter
« Vive la liberté ! » – de se faire piller
« Vive la liberté ! » – de confier son sort
Aux bourgeois repentis qui ont habilement changé de bord
L’horreur est humaine
L’horreur c’est ce système !
Ce texte a été écrit en référence à la guerre en Irak et aux discours fumeux sur l’exportation nécessaire de la démocratie représentative et de l’État de droit. L’histoire nous enseigne qu’il n’y a rien de bon à attendre des « missionnaires armés » pour qui « démocratie » est le synonyme d’accès libre aux ressources d’un pays tiers et de soumission de ce dernier aux directives du FMI.
Les « nouveaux convertis », ce sont ces élites politiques ou économiques. L’autoritaire d’hier se découvre démocrate, célèbre les vertus du multipartisme, de l’État de droit, des libertés démocratiques. Les nomenklatura de beaucoup d’anciens pays dits socialistes ont réussi à se perpétuer en troquant l’uniforme vert-de-gris contre le costume trois-pièces, le marxisme-léninisme besogneux contre le néo-libéralisme sauvage. Dans les pays arabes (Tunisie, Égypte, Libye), les mêmes phénomènes sont à l’œuvre : ceux qui ont prospéré sous l’ancien régime aspirent à prendre la tête de la contestation politique et sociale.
Un soulèvement populaire, une révolte, une grève font jaillir la parole et ouvrent le champ des possibles. Mais ils ouvrent ce champ à tout le monde, et notamment à celles et ceux qui disposent des meilleures armes pour prendre leur revanche sociale sur le pouvoir.
Ceux d’en bas sont désarmés : ils n’ont que leur nombre à faire valoir et leur capacité à créer, consolider et faire vivre des contre-pouvoirs populaires. Face à eux, il n’y a pas seulement l’ancienne élite délégitimée en phase de reconversion démocratique, il y a également ces opposants prêts à tout accommodement pour parvenir au pouvoir.
Loger les pauvres partait d’un bon sentiment
Mais les bons sentiments se marient mal avec l’argent
Augmenter les salaires aurait pu être la solution
Mais endetter les pauvres rapportait beaucoup plus de pognon
Les banques se sont jetées avec avidité
sur ce nouveau marché, spéculant sur l’immobilier
Les pauvres ont cru toucher au rêve américain
Mais on ne rêve pas longtemps
Au milieu des requins
Partager les risques en se gavant de pognon
Multiplier les prêts au-delà de toute raison
S’endetter toujours plus devient la seule solution
offerte aux gueux qui ne veulent pas perdre leur maison
Les banques se sont jetées avec avidité
sur ce nouveau marché, spéculant sur l’immobilier
Les pauvres ont cru toucher au rêve américain
Mais on ne rêve pas longtemps
Au milieu des requins
« Gimme back my money »
Tout ce qu’elles touchent se transforme en bulle
Et toute bulle, par principe, finit par éclater
Les pauvres se croyaient riches,
se pensaient propriétaires
Les voici sans argent, à dormir le cul par terre
Le capitalisme est une machine infernale
Productrice de rêves tout autant que de drames
Mais les premiers se vendent
tandis que les seconds se vivent
Et ainsi va le monde dominé par les requins
Les subprimes sont des crédits immobiliers consentis aux ménages américains ne présentant pas les garanties financières suffisantes pour souscrire un prêt normal auprès d’une banque.
Les apprentis-sorciers du capitalisme mondialisé, formés aux mathématiques, ont monté des systèmes extrêmement complexes où tout le monde est censé faire son beurre. Certains établissements financiers américains ont fait du subprime leur spécialité en trouvant appui auprès du système bancaire traditionnel. Quand la conjoncture est favorable, le système fonctionne : l’emprunteur à risque met sa maison en hypothèque, celle-ci sert donc de garantie, et les financiers font de confortables marges de profit grâce à ces clients à risque. S’il ne peut plus payer, la banque récupère le bien et le revend. Quand le marché immobilier est à la hausse, c’est le temps des bonnes affaires. Quand les taux d’intérêt, devenus variables, augmentent, c’est encore le temps des bonnes affaires car il y a toujours un apprenti-sorcier pour vous faire contracter le nouveau crédit indispensable au remboursement de votre crédit précédent. Mais quand le marché de l’immobilier entre en récession, là l’angoisse étreint nos financiers. Ils ne pleurent évidemment pas pour les pauvres pousser par milliers à la rue. Ce qu’ils redoutent, c’est qu’il n’y ait plus personne intéressée par l’achat de maisons qu’ils ont récupérées au prix initial, voire même au prix actuel du marché. Ils ont joué avec le feu et sont en train de se brûler. Ils se croyaient virtuellement à la tête d’une fortune colossale et ils voient celle-ci fondre comme neige au soleil, tandis que les établissements financiers spécialisés dans les subprimes font faillite les uns après les autres. Du coup, ils actionnent le frein à main, deviennent de plus en plus méfiants, rechignent à faire crédit. Moins de crédits signifie moins de consommation. Moins de consommation signifie moins de croissance. Moins de croissance signifie récession.
Le capitalisme est une machine infernale. Pour stimuler la croissance, on se doit de consommer, tout et n’importe quoi. Pour consommer, on doit emprunter. Aux États-Unis, on vit littéralement à crédit, la corde autour du cou, l’épée de Damoclès au-dessus de la tête. On est piégé, trop occupé à survivre au quotidien, à préserver ses biens si fragiles pour lutter collectivement.
Aujourd’hui, des milliers d’Américains sont à la rue, chassés de leurs maisons, réduits à rien ou pas grand-chose. Certains, des retraités, multiplient les petits boulots pour éviter de sombrer complètement dans la misère. Tout à son rêve américain, Sarkozy, lors de la dernière campagne présidentielle, s’était fait l’apôtre de cette logique infernale. En consommant, on crée des emplois, on crée des richesses, on crée de la sacro-sainte croissance. Tout doit être marchandise, tout peut être monnayable. Et pour que cela soit possible, envisageable, il faut formater les esprits. Le néolibéralisme est à sa façon une politique de civilisation qui suinte la misère, l’exploitation, le consumérisme et l’atomisation.
Hygiène de vie impeccable
Compétiteur redoutable
Le culte de la performance
m’habite en permanence
Face au miroir, je jouis de mon corps
De mes muscles saillants, de mes biceps en or
Je suis fort, je suis beau, je suis irrésistible
Sculpté par Breker*, je me sens indestructible
Men sado in corpore maso
DRH de premier plan
Génial et compétent
Inaccessible au doute
Je contrôle toutes mes troupes
Je parle, ils écoutent, ils sont hypnotisés
Je galvanise mes gueux, vivifie leurs pensées
Je suis fort, je suis beau, je suis charismatique
L’art de la rhétorique vaut bien plus que la trique
Men sado in corpore maso
Pour réussir ici bas, iI n’y a qu’une solution
Faire de son corps une machine
Et ne penser qu’à soi
Je déteste les faibles, les pauvres, les résignés
Les geignards, les gueulards et les entêtés
Ceux qui ne veulent pas comprendre
que pour exister
Faut marcher sur les autres, oser les piétiner
Men sado in corpore maso
Blinder son âme et son corps
Donner le change, faire le beau
Inaccessible aux remords, se garder de la parano
Au fond de moi, je sais bien que je ne suis rien
Qu’un bipède cynique, un nuisible, un pédant
Mais je ne suis qu’un produit de la modernité
Qui érige en modèle la médiocrité
Men sado in corpore maso
Depuis trois décennies, nous assistons à une brutalisation des rapports sociaux en entreprise. Cette brutalisation a été rendue possible entre autres par un niveau élevé de chômage, l’éclatement du salariat en de multiples statuts (ce qui freine l’affirmation d’une identité collective), la réorganisation des lieux de production (ce qui casse les collectifs de travail), le déclin du syndicalisme et de la « conscience de classe ». Il signe aussi la victoire (provisoire !) du patronat sur le plan des idées. En bons libéraux, les patrons veulent que les salariés ne se soucient que de leur intérêt personnel et participent à la guerre commerciale en faisant corps avec « leur » entreprise à travers les cercles de qualité et autres dispositifs. Pour illustrer cette dimension idéologique, nous avons utilisé l’image d’un DRH/Manager narcissique, pervers, cynique mais au fond de lui tout à fait conscient de sa vacuité.
*Arno Breker : sculpteur dont les œuvres monumentales, magnifiant le corps viril et sain, faisaient le bonheur des nazis.
Au nom du père, du fils et du Saint-Esprit
Au nom d’un Dieu omniscient, de la couleur de l’argent
Au nom de la civilisation chrétienne et mercantile
Une main sur la bible, l’autre sur le divin baril
Au nom du père, du fils et du Grand Kapital
Du rouleau-compresseur appelé néo-libéral
Au nom de la civilisation du béton et du verre
De la culture jetable qui envahit l’univers
Au nom du Fonds monétaire international
De la Banque mondiale, des multinationales
Au nom des caddies à remplir, des pensées à occuper
De la sacro-sainte loi mortifère du marché
Au nom de l’intérêt général, généralement particulier
Particulièrement pour celles et ceux dont c’est le métier
D’exploiter, d’humilier et de bomber le torse
Face aux gueux qui s’opposent au royaume du négoce
Au nom des bénéfices à faire et du taux de profit
De la conquête des terres et de la théorie
Du travail qui rend libre et donne la dignité
A condition bien sûr de ne pas en crever
Au nom du droit à polluer, à tout marchandiser
Rien ne doit échapper à l’emprise du marché
Qui enserre, qui aliène la planète entière
Et transforme la critique en slogan publicitaire
Sleep tight my girl, don’t be scared of the noise made by the planes over your head / Sleep tight my Boy, don’t be scared of the noise made by the planes over your head
Cette chanson a été écrite en 2003 et figure sur notre premier album sous le titre « Operation Free Oil / Prospect & enslave » avec une orchestration (ah ah !) complètement différente. Elle était une réaction à la guerre du Golfe, cette « opération de police internationale » menée au nom du Droit et de la Justice qui visait à châtier un ancien allié, Saddam Hussein, tombé en disgrâce. Elle était aussi une peinture du monde à l’heure du néolibéralisme rayonnant. Le temps a passé mais ce regard critique nous semble toujours pertinent, même si, çà et là, des mouvements populaires surgissent et laissent espérer que le capitalisme et la démocratie bourgeoise ne seront bientôt plus perçus comme l’horizon indépassable de l’Humanité.
Ne pas compter son temps
– Believe me ! » / Storytellers make my day
« Croire en soi, à sa bonne étoile avec opiniâtreté
– Trust me ! » / Storytellers make my day
« La chance sourit aux audacieux
Qui ne tente rien n’a rien
– Believe me ! » / Storytellers make my day
« La richesse est un don du Ciel
Remercions la Providence
– Trust me ! » / Storytellers make my day
Les chemins de l’exploitation
ne sont pas pavés de bonnes intentions
– Don’t believe them ! / Storytellers make my day
L’appât du gain est un moteur
qui se gorge de notre sueur
– Don’t trust them ! / Storytellers make my day
Robber barons ! Robber barons
Voleurs, pillards sans vergogne
La célébration des self-made-men est nécessaire au capitalisme pour justifier l’inégalité sociale. La réussite sociale viendrait sanctionner le travail, la piété et l’esprit d’initiative. Ce discours autojustificateur a pour fonction de nous faire oublier que les grandes fortunes se sont faites, aux États-Unis, par la violence et la corruption et que les magnats de l’industrie de l’époque avaient pour surnom les « barons voleurs ». Cela a-t-il fondamentalement changé ?
C’est un printemps plus rouge que les autres
Le Dieu du sang a trouvé ses apôtres
Dressé des listes et armé ses chiens / Muyaga
L’Akazu peut se frotter les mains
Et Kangura peut cracher son venin
La même clameur se fait entendre / Inkotanyi
Muyaga / Souffle le vent
Souffle, souffle ce putain de vent
Tchak, tchak la machette s’abat
Sur les corps apeurés, sur les bras en croix
Crânes ouverts et ventres écorchés / Muyaga
Tchak, tchak, la machette frappe
Et des milles collines dégueule le sang
Des sacrifiés que personne n’entend / Inkotanyi
Pour Dieu, la patrie, le lopin de terre
Parce qu’on te tue si tu ne veux pas le faire
La servitude fait vomir la haine / Inkotanyi
Muyaga / Souffle le vent
Souffle, souffle ce putain de vent
(Et certains de dire « Plus jamais ça »)
Violences humaines aux formes si bestiales
Qui se déchaînent dans l’ivresse et la hargne
Qu’elles en feraient frémir les montagnes / Muyaga
Violences bestiales aux formes si humaines
Qui se propagent comme la gangrène
Ce maudit vent qui empuante le ciel / Muyaga
Muyaga / Souffle le vent
(Et certains de dire « Plus jamais ça »)
Muyaga / Souffle le vent
Le chanteur d’un groupe crust américain s’étonnait et regrettait que le génocide rwandais n’ait pas fait l’objet de coups de gueule musicaux de la part de la scène anarcho-punk. Ayant beaucoup écrit dans la presse anarchiste sur ce génocide, à l’époque des faits et depuis, j’ai essayé de condenser en une chanson les éléments permettant de comprendre ce déchaînement de violence des extrémistes hutus sur les civils tutsis et les opposants hutus au régime en place, régime soutenu notamment par la France qui, comme chacun le sait, est le pays du bon vin, des mille fromages et des droits de l’homme.
L’Akazu était une organisation rassemblant l’aile dure du régime Habyarimana. C’est elle qui dressait les listes de personnalités à tuer. Kangura, son organe de presse, a préparé psychologiquement la population hutue au génocide en l’embrigadant idéologiquement. L’implication d’une partie non négligeable des Hutus dans la machine génocidaire s’explique par sa soumission à l’église (dont nombre de cadres participèrent au génocide), par la force de la propagande nationaliste (qui faisait des Tutsis des citoyens de seconde zone, des « ennemis de l’intérieur ») et par l’appât du gain (le Rwanda est un petit pays densément peuplé où la compétition pour l’accès à la terre était rude. Liquider un voisin libérait ipso facto des terres pour l’agriculture).
Les Inkotanyi (rebelles) étaient surnommés Inienzy (cancrelats) par les extrémistes hutus. L’animalisation de l’ennemi est un préalable à sa liquidation physique. Les nazis usèrent de ce même procédé sémantique avec les juifs qu’ils comparaient à des rats.
Muyaga désigne un vent fort avec des bourrasques imprévisibles et destructrices. C’est le nom donné par les Rwandais à la guerre civile de 1959 qui entraîna les premiers massacres de tutsis.
J’ai longtemps cru en lui, à ses discours, à son ambition
Nous étions faits pour réussir, pour conquérir le monde entier
J’ai bossé sans relâche, je me suis impliqué à fond
Dans la rhétorique managériale, dans la course effrénée au pognon
Hire and fire, telle est la loi d’aujourd’hui
Tu es de trop, tu es le fardeau, l’agneau qu’on sacrifie
Casse-toi, bouge de là, disparais, reviens pas, telle est ton sort aujourd’hui
Tu es de trop, tu es le fardeau, l’agneau qu’on sacrifie
Assis dans son bureau, j’écoute ce qu’il me dit
Je fus number one dans mon secteur, mais ainsi va la vie
Compression de personnel, variable d’ajustement
Telle est la loi actuelle du marché, on ne peut faire de sentiment
Hire and fire, telle est la loi d’aujourd’hui
Tu es de trop, tu es le fardeau, l’agneau qu’on sacrifie
Casse-toi, bouge de là, disparais, reviens pas, telle est ton sort aujourd’hui
Tu es de trop, tu es le fardeau, l’agneau qu’on sacrifie
There’s nobody on the dancefloor
Just me and my gun
and this bloody bastard and nowhere left to run
Hire and fire, telle est ma réponse aujourd’hui
Si je suis de trop, tu l’es aussi, tu me tues, je t’ôte la vie
Hire and fire, telle est ma réponse aujourd’hui
Si je suis de trop, tu l’es aussi, tu me tues, je t’ôte la vie
Your boss will be the next…
Cette chanson est la suite logique de Men sado in corpore maso. Elle m’a été inspirée par un fait divers : l’assassinat d’un patron par le salarié qu’il venait de licencier. Ce salarié modèle, travailleur infatigable, avait complètement intégré le discours managérial : travailler plus pour gagner plus, combattre la concurrence, ne pas mêler sentiments et affaires. Il était sous le charme de son supérieur hiérarchique qui incarnait à ses yeux la réussite sociale. Il vécut son licenciement comme une injustice et comprit alors qu’il s’était fait berner depuis des années. Il sortit son flingue et exécuta son patron. C’est peut-être cela la rançon du cynisme et du mépris.
Dès que je fous les pieds quelque part,
faut que j’en sonde le sol
Pour en sortir des dollars sous forme de cuivre ou de pétrole
Je suis une multinationale, j’ai le dollar comme drapeau
Et la planète comme…
Home sweet home
Décivilisateur, un monde uniforme c’est mon credo
Je vends ma merde sans crispation
de la Cordillière jusqu’au Congo
Renault, Coca-Cola, je suis une multinationale
J’ai le dollar comme seule loi…
Home sweet home
Abolissons les frontières, tenons-nous par la main,
ne sommes-nous tous pas frères ?
Unifié par le marché, oublions nos conflits, œuvrons pour le Bien commun
Le monde est un champs de bataille, et moi, j’en suis le roi
Il est dans ma nature, d’être sans foi ni loi
Il n’y a qu’une seule chose qui m’angoisse et m’horrifie
C’est la baisse tendancielle du taux de profit
Abolissons les frontières, tenons-nous par la main,
ne sommes-nous tous pas frères ?
Unifié par le marché, travaillons sans relâche à remplir nos caddies
Enterrons sans attendre toutes ces idéologies qui nous promettent l’Icarie
L’utopie mène au goulag, croyez-moi sur parole, ne vous souciez que de votre vie
Imaginez un traité de commerce autorisant les multinationales et les investisseurs à poursuivre en justice les gouvernements pour obtenir des dommages et intérêts en compensation de toute politique ou action publique qui aurait pour effet de diminuer leurs profits. C’était l’une des clauses contenues dans un traité intitulé Accord multilatéral sur l’investissement (AMI). L’AMI fut repoussé en 1999, mais cela n’a que freiné la volonté des multinationales d’imposer leurs diktats aux populations avec la complicité active ou passive de nombreux États.
Rien ne change donc dans la volonté des élites de détrousser les peuples, ce ne sont que les formes qu’ils mettent en place qui évoluent. Depuis 1945, les règles protectrices posées par nombre d’États « démocratiques » ont été nécessaires à la construction d’un capitalisme « pacifié », placé sous le signe de l’État-providence. Aujourd’hui, la paix sociale repose sur l’écrasement des capacités de résistance des individus et leur soumission à la pensée unique. Les défenseurs de l’État régulateur, neutre, en sont pour leurs frais : aujourd’hui le capital transnational se sait plus fort que les États et ses bourgeoisies locales.
Nous ne sommes pas victimes aujourd’hui des excès de l’ultra-libéralisme mais de la logique libérale elle-même. Cette logique amène à un rapport de force constant ou rien n’est jamais acquis, ni pour les patrons ni pour les populations. Il ne s’agit pas de mettre des règles pour corriger le marché mais de se rendre compte que toutes ces règles sont des pis-aller. Il nous faut donc être à même de rejeter la logique en elle-même plutôt que ses prétendus excès. Peu importe que ce soient des capitalistes américains, transnationaux, français ou bretons qui nous détroussent et font de notre société une société hiérarchisée et inégalitaire. Le capital n’a pas de patrie. Ça tombe bien, les travailleurs non plus ! Encore faudrait-il qu’ils s’en souviennent !
« L’homme veut être libre et la démocratie, si elle ne lui donne pas la liberté, lui offre tout au moins l’illusoire et l’éphémère satisfaction de se croire libre politiquement, alors qu’il est enchaîné dans les lois économiques dont il forge lui-même les mailles. » (Jules Chazoff)
I met you (when) I was a brat
I was fourteen years old
I was young, you seemed eternal
You had the face of Africa, of latin America
I dreamed to join one’s guerilla
Why can’t you say
« Remember the good old days,
why don’t you follow me ?
We could walk hand in hand, together,
again and again, why don’t you follow me ? »
So disgusted and outraged
I read your books to satisfy
My unquenchable thirst of knowledge
You had the serious of Karl Marx,
the spirit of Bakunin
You’ve given to me the weapons of freedom
Why can’t you say
« Remember the good old days,
why don’t you follow me ?
We could walk hand in hand,
together, again and again,
why don’t you follow me ? »
Time has passed, I’m fat and old
Still angry and outraged
I fight each day against misanthropy
It’s hard to fight against their world full of
promises and lies
I’ve lost the trail of my old mole*
Why can’t you say
« Remember the good old days,
why don’t you follow me ?
We could walk hand in hand,
together, again and again,
why don’t you follow me ? »
Why can’t you say
« Remember the good old days,
why don’t you follow me ?
We could walk hand in hand,
together, again and again,
why don’t you follow me ? »
C’est l’histoire d’un quadragénaire qui fait le bilan de sa vie intellectuelle et militante. C’est l’histoire d’un gars qui attend que la Révolution redevienne une perspective pour les travailleurs et travailleuses. C’est l’histoire d’un gars qui déprime parce qu’il vieillit et désespère autant de lui-même que de ses contemporains.
L’histoire sociale fait son chemin parfois de façon souterraine et les révolutions surgissent ainsi sans crier gare. D’où la référence à la « vieille taupe » (old mole), métaphore utilisée par Karl Marx en son temps.
Elle ne marche pas, elle surfe, elle glisse
Elle ne marche pas, elle surfe et glisse
sur l’asphalte indocile des villes
C’est la beauté de l’insouciance
Elle ne marche pas, elle surfe et glisse
sur l’asphalte indocile des villes
Tous ces regards, quelle importance ?
Mais la foule n’aime pas celles qui se pavanent ainsi, inaccessibles au mépris
Cela devrait être interdit !
Celles qui sortent de la norme,
qui jouissent de la vie dans un grand éclat de rire
Et pourtant Dieu que c’est joli
Elle ne marche pas, elle surfe, elle glisse
Elle ne marche pas, elle surfe et glisse
sur l’asphalte indocile des villes
C’est la beauté de l’insouciance
Elle ne marche pas, elle surfe et glisse
sur l’asphalte indocile des villes
Tous ces regards, quelle importance ?
La foule a crié, s’est mise à insulter l’impudente, l’effrontée qui osait ainsi se pavaner
Si les mots furent violents,
alors que dirent des coups qui la laissèrent gisante
La foule adore le goût du sang
Le calme est revenu, l’ordre règne
Si fière et satisfaite du devoir accompli
La foule est repartie chez elle
vaquer à ses occupations
A chaque jour suffit sa peine
Il n’y a guère qu’un chien errant,
habitué aux pierres et à coups,
à se soucier de la Belle
Il ne marche pas, ni ne surfe ni ne glisse,
Il titube et gémit qu’on lui laisse vivre sa vie
S’habiller en femme, maquiller ses yeux
Et oublier un temps
que la nature l’a doté d’une queue
Il ne marche pas, ni ne surfe ni ne glisse,
Il titube et gémit qu’on lui laisse vivre sa vie
Il n’exige rien, réclame seulement
Qu’on le laisse enfin être « elle »
« On ne naît pas femme, on le devient » disait Simone de Beauvoir. C’est le cas également pour les hommes. La société façonne les individus de façon à ce que leur comportement soit conforme à leur sexe biologique : l’homme se doit d’être viril, la femme, sensible. Même si les moeurs évoluent, nos sociétés demeurent marquées par le sexisme et l’homophobie, et certain(e)s n’acceptent toujours pas qu’un individu transgresse la « norme » et affiche publiquement son identité sexuelle.
Ils ont débarqué au petit matin
tel des conquérants
Les verres fumés de leurs lunettes noires
leur donnaient un air inquiétant
Sont-ce des truands, des hommes d’affaires,
des hommes capables de contrôler le temps ?
Ils ont sorti de leur attaché-case
un amas de documents
Working, starving, suffering
Dans leur mallette il y avait le remède
pour abattre la misère
Rendre la terre plus fertile et le grain
mille fois plus résistant
Est-ce un miracle, un don de Dieu,
la promesse d’un avenir radieux ?
Ils ont sorti de leur attaché-case
des contrats et de l’argent
Working, starving, suffering
La corde au cou, la bave aux lèvres
Ils ont souillé la terre et les champs
jusqu’au regard des enfants
Tel un prisonnier, aux mains entravées,
une mort programmée sous contrôle d’huissier
Ils ont souillé la terre et les champs
jusqu’au regard des enfants
La corde au cou, la bave aux lèvres
Ils ont souillé la terre et les champs
jusqu’au regard des enfants
La terre est morte, nos poches sonnent creux,
et nos enfants crèvent, c’est le destin des gueux
Ils ont souillé la terre et les champs
jusqu’au regard des enfants
La « Révolution verte » a marqué les années 1960-1970. Elle avait pour but de rendre les agricultures des pays du sud plus productives en modifiant les pratiques agricoles des paysans par le recours aux engrais, le développement de l’irrigation, le choix de variétés à haut-rendement. Elle poussait également les paysans à délaisser les cultures vivrières au profit de cultures destinées à l’exportation. Aujourd’hui, la seconde Révolution verte vise à étendre les cultures d’OGM sur le globe, autrement dit à soumettre encore plus les paysans aux diktats des multinationales de l’agro-business. Cette politique se mène comme hier au nom de la lutte contre la faim dans le monde…
J’ai tant croisé de gens dont on avait salé les plaies
Dont les cris de colère entre quatre murs se perdaient
Murs capitonnés d’un HP, suintants d’une usine à progrès
J’ai tant croisé de gens à l’existence chaotique
Tendant la main pour obtenir un peu de ce putain de fric
De ceux qui, mieux lotis, se refusent à croiser leur regard
J’ai tant croisé de gens à l’arrogance non feinte
Accumulant les biens pensant conjurer ainsi la crainte
De se retrouver, un jour seuls, face à leur vacuité
J’ai tant croisé de gens dont l’idéal de vie
C’est travail, famille, et le samedi, faut pousser le caddie
Et trouver cela normal et voter quand c’est permis
J’ai tant croisé de gens qui refusaient de se poser
La question existentielle qu’on n’entend jamais à la télé
Qui suis-je, où vais-je existerais-je sans ce satané porte-monnaie ?
Cette chanson a été écrite en 2003 et figure sur notre premier album « Prospect & Enslave ». Comme nous la jouons depuis cette date avec toujours autant de plaisir, nous avons décidé de la ré-enregistrer. La version initale faisait 3’36, celle-ci 3’31, ce qui tend à prouver qu’en vieillissant, on ne mollit pas forcément.
All songs written by Haymarket.